Trois livres sous le feu des projecteurs

Un peu de lecture

Neuf jours après la journée mondiale du livre, le rendez-vous quinzomadaire de la Quotidienne d’Union Presse fait le point sur les sorties des prochaines semaines. Face aux ténors que sont Joël Dicker et Guillaume Musso, trois ouvrages prennent d’assauts les linéaires. Le roman dystopique de Sarah Vajda, la redécouverte d’un demi-siècle d’histoire culturelle par Laure Adler et une réflexion sur le journalisme par Denis Jeambar se partagent l’actualité des parutions du mois de mars.

Retenir la vie, itinéraire d’une femme engagée, Laure Adler

Ex-figure emblématique de la radio publique France Inter, Laure Adler surprend en publiant le 21 mars prochain Retenir la vie, itinéraire d’une femme engagée (Bouquins). L’édition établie et présenté par l’écrivain et spécialiste d'histoire culturelle Nicolas Idier rassemble les pièces majeures d’une œuvre très variée.

L’ouvrage invite à redécouvrir un demi-siècle d’histoire culturelle, ponctué de rencontres avec des personnalités majeures du monde des arts et de la politique, des années 1970 à nos jours.

Les portraits au vif brossés par l’ancienne présentatrice de l’émission « L’Heure bleue » et chroniqueuse régulière de « C ce soir », tirés de ses biographies de femmes, rejoignent l’intégralité de son premier essai, écrit à l’âge de vingt-neuf ans, aux origines de l’engagement d’une vie pour les droits des femmes. Elle explore les allées du pouvoir, notamment les années Mitterrand, dont elle fut conseillère culturelle de 1989 à 1993, et aborde des questions intimes et sociétales majeures, comme le deuil, la vieillesse et la fin de vie. Laure Adler ouvre ensuite grand les portes de la création, portée par sa passion pour toutes les formes de culture – à commencer par le théâtre, mais aussi la littérature, les arts visuels et la peinture, le cinéma, la mode.

Les nombreuses transcriptions d’entretiens radiophoniques permettent de retrouver le grain de voix et les inflexions de pensée d’une femme en mouvement, au plus près des enjeux de notre temps.

Les jeux sont faits, Sarah Vajda

Toujours en mars, la prose incisive et ironique de Sarah Vajda empreinte la voie de la dystopie. Dans son nouveau roman intitulé Les jeux sont faits, qui paraîtra au Cherche Midi le 14 mars prochain, l’auteure, ancienne metteuse en scène de théâtre pendant quinze ans et auteure de plusieurs romans et biographies, dont Maurice Barrès (Flammarion, 2000) et Jean-Edern Hallier, l’impossible biographie (Flammarion, 2003), met en scène Mireille, qui fuit le programme d’euthanasie obligatoire mis en place par l’État.

Un gouvernement vient de décider qu’après l’âge de 68 ans, l’euthanasie serait obligatoire. Mesure d’économie. Les vieux coûtent cher, comprenez-vous. Parvenue à cette limite légale, Mireille décide qu’elle n’obéira pas. « À l’innommable, l’injuste, l’intolérable, ne jamais consentir ! », tel est son mot d’ordre. Dans son road trip, elle croise la route de Davia, une adolescente fascinée par la liberté et la soif de vie de son aînée.

Sarah Vajda écrit comme son héroïne fuit, avec rage et ironie. Avec nostalgie aussi, parfois, mais une nostalgie nerveuse, furieuse, qui vient percuter notre époque assoupie ; à l’image de Mireille – « plus Carmen que Bovary », comme la décrit l’auteur –, personnage magnétique que le lecteur n’oubliera pas.

Il s’est passé quelque chose, Denis Jeambar

L’ancien directeur de la rédaction du Point, président d’Europe 1, président et directeur de la rédaction de L’Express Denis Jeambar reprend la plume avec la sortie le 13 mars prochain d’Il s’est passé quelque chose (Calmann-Lévy). L’auteur d’une vingtaine d’ouvrages dont Une femme sans larmes (Calmann-Lévy, 2022) et Et Mara ferma les yeux (Calmann-Lévy, 2019) conte une histoire de transmission qui, au-delà de l’enquête, met en scène le passage de témoin entre l’ancienne génération et la nouvelle et livre ainsi une subtile réflexion sur l’évolution du journalisme.

Riche et pistonné, Sydné est loin de faire l’unanimité à la rédaction du Corsaire. Et son travail n’y change rien. Pour prouver qu’il a sa place dans la profession, il démissionne et se lance dans une enquête de longue haleine sur la disparition d’un confrère, Jacob Sfrec, grand reporter de soixante-quinze ans qui s’est évaporé dans l’indifférence.

À partir de ses écrits et des témoignages de ses proches, Sydné reconstitue la vie de cet homme aux multiples facettes : son histoire familiale marquée par la Shoah, son grand amour sacrifié à sa vocation, sa fascination morbide pour la guerre et la cruauté, ses engagements et ses désillusions.